A propos sciencetrotter

Recherche, Photo & Exploration !

De Hanoï à Kuala Lumpur, de Kuala Lumpur à Jakarta… de Jakarta à Depok !

Embarquement immédiat pour une deuxième étape laborantine : l’Indonésie !

A dire vrai, j’avais parié sur la Malaisie pour une deuxième halte scientifique… Mais que serait une belle aventure sans son lot de surprises et de rebondissements ?! Un premier rendez-vous manqué donc avec Kuala Lumpur, mais qui m’aura permis de belles rencontres imprévues à l’Universitas Indonesia grâce à Deni, enseignant-chercheur au département de métallurgie & matériaux de cette université et doctorant dans mon labo de thèse à Toulouse… mais mon dernier mot n’est pas dit sur la Malaisie !

Avant de se replonger au cœur d’un nouveau laboratoire et d’une nouvelle problématique, voici une petite série anecdotique qui vous emmène de Jakarta à Depok, où se trouve l’université (Depok – point géographie – qui est à Jakarta ce que Palaiseau est à Paris ou Labège à Toulouse, bref, le bout du monde, vers le sud !). Certains pourront y retrouver les émotions du RER, comme quoi, de ce côté-là, toutes les capitales du monde se valent ?! Avec une petite particularité ici, les deux kereta khusus wanita en queue de train, réservées aux femmes : même en y rentrant sans y prendre garde la première fois, il y a rapidement le sentiment d’un truc qui cloche… mmh peut-être la fâcheuse impression de « déborder » d’une tête de la masse ??!

Bon voyage !

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Je me dois tout de même d’accompagner cet article d’un mea culpa – mea silentium: ces derniers mois ont été riches de laboratoires, de rencontres, de destinations, de projets scientifiques, et d’une quantité de belles choses qui m’ont laissé peu de temps pour tout mettre en forme… mais y’a plus qu’à partager et à continuer !

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Le labo/bureau de la bonne humeur

Hanoï, Viêt Nam, Janvier 2014 – Mon QG de ces quelques jours passés à l’ITT a été le bureau de Nam et Phương, deux doctorantes de l’équipe de Thanh (cf. Viêt Nam : ITT la tropicale pour un rappel du contexte !). Une bien petite pièce pour deux doctorantes et leur cinq ou six stagiaires qu’elles encadrent (et une squatteuse de passage…), mais bien vivante et sympathique !

Entrez par un grand couloir lumineux… A votre droite, une partie expérimentale : une hotte, quelques tables en guise de paillasse, des produits et de la verrerie stockés sous les tables et sur des étagères… de quoi faire quelques manips. Les blouses sont ici remplacées par les manteaux : on est en janvier, et si le soleil pointe parfois le bout de son nez, il ne fait pas bien chaud et toujours très humide, particulièrement dans ces bâtiments qui ne sont pas chauffés. A gauche, deux ordis, principalement utilisés par Phương et Nam. Du coup, les stagiaires, s’il n’y a ni paillasse, ni ordi de libre, doivent bien trouver de quoi s’occuper ;) D’ailleurs en dehors de la séance de tricot en labo, j’ai assisté à une fascinante pause points de croix à quatre mains devant l’institut… Plutôt malin, développer autant de patience et d’application promet une belle carrière dans la recherche !

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Bon, et puis comme tout « bureau des thésards » qui se respecte, quelque soit le coin du monde, il y a forcément un moment où on se met à grignoter. Et alors rintintin, n’espérez même pas les trucs gras et sucrés dont on raffole en France, le Viêt Nam c’est un pays sain ! Quand on grignote, ce sont des fruits ! Et si le fruit est acide et pas très sucré, voire pas très mûr, on le trempe dans du sel avant de le croquer. Il faut bien reconnaître qu’ils en ont une diversité incroyable, de toutes les formes, couleurs et saveurs… Et ma palme revient sans aucun doute au chôm chôm (alias « le chevelu »), une sorte de cousin du litchi, frais et juteux, au goût beaucoup pus acidulé !

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Bon appétit !

Il était donc question de dépôts biomimétiques…

Diantre, fichtre et vertuchou ! C’est que je n’écris pas aussi vite que je ne le voudrais ! Reprenons l’histoire là où elle en était… il était donc question de dépôts biomimétiques sur des prothèses osseuses… « Quis ? Quid ? Ubi ? Quibus auxiliis ? Cur ? Quomodo ? Quando ? » [1]

La plupart des prothèses sont faites de métal. Pourquoi du métal ? Principalement pour des raisons mécaniques : quand on vous remplace une articulation comme la hanche ou le genou par exemple, il vaut mieux que ça tienne le coup ensuite quand vous repartez galoper. Et pour ça, le métal, ça fait partie de ce qu’il y a de mieux : titane, acier inox, alliages divers et variés… Cela dépend de ce que l’on recherche : plus ou moins résistant à la corrosion, plus ou moins bonnes propriétés mécaniques, plus ou moins facile à usiner, plus ou moins cher, etc… tout est une question de compromis !

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Mais quel que soit celui qu’on utilise, la faiblesse du métal, c’est que lorsqu’on l’implante dans l’os,* il n’y a pas une grande (al)chimie entre les deux. Que peut faire ce pauvre os, en contact avec ce matériau froid et lisse, sans possibilité de s’accrocher ni de s’agripper à lui ?? [petite musique triste, une larme se devine dans votre œil attendri] Et je vous laisse imaginer qu’un implant qui n’est pas en parfaite symbiose avec son os, et qui potentiellement se « déchausse », ça ne fait pas plaisir…

Alors que faire ? [détresse dans votre regard] Tout serait donc perdu ? Heureusement non ! Des vaillants chercheurs, sur leurs chevaux blancs, ont chevauchés les déserts de désespoir pour trouver une oasis d’inspiration (vous ai-je déjà dit que l’objectivité n’était pas mon point fort ?) : déposer à la surface de la prothèse, avant de l’implanter, une fine couche qui ressemble à de l’os. D’où la notion de biomimétisme : on essaye de faire pareil que dans la nature, parce que mine de rien, c’est souvent assez bien réfléchi. Et l’os – il faudra que j’y revienne un de ces jours – c’est en grande partie du phosphate de calcium. Des ions calcium Ca2+, phosphates PO43-, et d’autres (hydroxyles OH, carbonates CO32-, hydrogénophosphates HPO42-…) qui sont organisés d’une certaine manière, ce qui forme une phase que l’on appelle « apatite ». Ainsi, les cellules de l’os, si elles voient ce phosphate de calcium plutôt que le métal, elles savent quoi faire, et peuvent créer des liaisons chimiques entre l’implant et son hôte.

Donc voilà, le but, c’est de déposer de l’apatite sur les implants métalliques. Et c’est l’objet de cette collaboration entre l’ITT et le CIRIMAT.

Il y a plusieurs manières d’y arriver qui ont déjà été développées : des voies douces, de type « sol-gel », ou un peu plus violentes, comme la projection plasma. ** La solution choisie à l’ITT, c’est une méthode électrochimique : le métal, ici de l’acier inoxydable (un certain 316LSS), est immergé dans une solution (l’électrolyte), qui contient notamment des ions calcium (Ca2+) et phosphates (sous forme H2PO4). On applique un courant : des électrons vont circuler et interagir avec ces ions (réaction de réduction). Et ces réactions vont perturber la tranquillité de ce petit système, principalement en modifiant le pH (c’est-à-dire la concentration des ions H+) à la surface de l’acier. Et alors qu’une phase de phosphate de calcium comme l’apatite était avant soluble et n’avait donc aucune raison de se former, voilà que ces changements diminuent sa solubilité et elle n’a d’autre choix que de précipiter sous forme d’une fine couche à la surface du métal. Tadaaam !

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L’avantage, c’est que l’on peut déposer le phosphate de calcium partout de manière assez homogène, et ce même si la prothèse a une forme un peu biscornue. On peut aussi contrôler l’épaisseur de ce que l’on dépose en maîtrisant certains paramètres comme la concentration des ions, le pH, la température… Bon bien sûr en réalité ce n’est pas toujours aussi simple et aussi « tadam » que ça et ça nécessite toute une étude : il faut réussir à déposer une phase pure qui ait les bonnes propriétés, éviter qu’elle se redissolve avec les conditions qui évoluent, il faut que le dépôt soit bien accroché à la prothèse métallique (sinon c’est un peu retour à la case départ du problème !)… Voilà plein de défis à relever !

Si vous voulez en savoir plus, les premiers résultats associés à cette étude menée par le Dr. Thanh et par la doctorante Nam ont été publiés ici. [2]

Sur ce, bonne journée et à la prochaine !

* pour tous les passionnants détails concernant l’implantation de prothèses comme celles de la hanche, je vous renvoie vers Emmanuelle K., doctorante du CIRIMAT spécialiste des anecdotes particulièrement sordides étayées sur ce genre d’intervention. Mais pour tous ceux qui devraient se faire opérer, ça se passe très bien et c’est bien souvent un grand soulagement, don’t worry be happy !

** Séquence pub, vous pouvez bouquiner par exemple la thèse d’Imane Demnati pour en savoir plus !

[1] Goscinny R. & Uderzo A. (1962). Astérix – La serpe d’or. Hachette, p43 8ème case. Adapté apparemment de Quintilien.

[2] Dinh Thi Mai Thanh et al., Controlling the electrodeposition, morphology and structure of hydroxyapatite coating on 316L stainless steel, Materials Science and Engineering C, 33 (2013), 2037-45.

Viêt Nam : ITT la tropicale

Première étape de ce « road of science trip » 2014 : l’Institute for Tropical Technology (ITT), à Hanoï ! Une végétation luxuriante, des murs ajourés qui laissent passer la lumière quand le soleil pointe son nez, un calme qui dénote avec l’agitation de Hanoï… il y a effectivement quelque chose de tropical qui se dégage de cet institut !

C’est grâce à une collaboration entre le CIRIMAT, (labo où j’ai fait ma thèse), et l’ITT que j’ai eu l’opportunité d’y faire ma première escale. Pour être précise, cette collaboration un peu particulière est un « Laboratoire International Associé » (LIA) * répondant au doux petit nom de « FOCOMAT » (Functional Composite material). **

J’ai principalement interagi avec Dr Thanh Dinh Thi Mai, *** et deux doctorantes, Nam et Phương, le sujet de la collaboration étant la mise au point de dépôts biomimétiques sur prothèses osseuses… Mais ceci fera l’objet d’un autre article !

* Compétence n°1 du chercheur : la maîtrise des quelques milliers d’acronymes définissant concepts abstraits, labos, techniques d’analyses, projets, contrats, réactifs, logiciels, financements… Sinon, bah tu loupes la moitié des conversations !

** Compétence n°2 du chercheur : une imagination débordante pour trouver un nouvel acronyme qui n’est pas encore associé à un truc trop connu, mais qui sonne quand même bien. Je vous conseille d’investir dans un Boggle.

*** Première crainte diplomatique : en fonction des cultures et des affinités, on ne parle pas d’une personne ou on ne s’adresse pas à quelqu’un de la même manière… Titre ou pas, statut ou non, prénom ou nom, voire même quelle partie du nom quand la « logique » n’est pas la même… J’adresse par avance mes plus sincères excuses et mes yeux de chat potté de la-petite-française-qui-ne-savait-pas à tous ceux que je vais froisser !

A propos de ce projet…

On nous demande souvent à quoi ça ressemble, un métier de chercheur, de l’intérieur ; si l’on trouve des choses, ce qu’on fait en vrai, tous les jours… Ce blog a pour vocation de donner un humble aperçu du monde de la Recherche. Et comme un labo c’est bien souvent coloré, géométrique et biscornu, et puis comme les chercheurs ont souvent des bouilles tout à fait sympathiques (enfin pas plus pas moins qu’ailleurs, on s’ entend ;) ), je vais essayer de le faire en grande partie par la photo.

1391713432397Chercheuse encore apprentie (qui ne l’est plus ?!), tout juste une thèse en poche (pour accéder à la version intégrale de votre futur livre de chevet, c’est par ici !), j’ai pour projet de partir quelques mois à la rencontre de chercheurs de différents coins du globe, comme une « science trotter« . Vue l’étendue assez vertigineuse des domaines de recherche de tout genre, j’ai décidé de me concentrer sur ceux qui travaillent sur des matériaux pour la santé, un monde passionnant et plein de surprises ! Mais sait-on jamais, au hasard des rencontres, je ne m’interdirai peut-être pas quelques écarts… :)

Bref, en termes scientifiques, peu de paramètres sont fixés, restent beaucoup de degrés de libertés ; c’est un projet qui va être amené à se modeler au fur et à mesure… En tout cas il se veut interactif, donc quelles que soient vos remarques, questions, suggestions, n’hésitez pas à me contacter !

A bientôt,

Sylvaine